Selon l’Assurance maladie, 20 % des accidents du travail et 60 % des arrêts de travail du secteur médico-social sont liés au mal de dos. (source : ameli.fr) Malgré les politiques de prévention déjà menées, les troubles musculo-squelettiques (TMS) restent la 1ère cause d’arrêt de travail et d’inaptitude chez le personnel soignant et font partie des facteurs de pénibilité les plus importants, notamment dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EPHAD).

Aide-soignants, brancardiers et infirmiers sont les premiers touchés. Or, compte tenu de leur forte sinistralité, les TMS du personnel soignant représentent un enjeu de prévention majeur pour maintenir des soins de qualité et un fonctionnement optimal au sein de ces établissements.

De quelles pathologies parle-t’on, où en sont les politiques de prévention actuelles, quelles sont les voies d’amélioration  ?

Identifier clairement les risques, évaluer les mesures à prendre, mettre à disposition du matériel adéquat et insister fortement sur la formation sont autant de pistes à suivre pour améliorer les conditions de travail des soignants et mieux prévenir les risques de TMS des soignants.

Que regroupe t’on sous la dénomination TMS ?

Les troubles musculo-squelettiques rassemblent les problèmes (douleurs, picotements, chaleur, crampes, raideurs…) rencontrés au cours de l’activité professionnelle et qui touchent les structures musculo- squelettiques :

  • les muscles;
  • les tendons ;
  • les ligaments;
  • les nerfs et les articulations (cartilage, bourse séreuse…).

Ils peuvent être localisés tant au niveau des membres supérieurs (épaules, coudes, poignets) que des membres inférieurs (genoux), voire de la nuque ou du dos.

Ces symptômes sont dus principalement à la « surcharge » de travail de ces régions même si l’Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des maladies professionnelles et des accidents de travail (INRS) estime que l’ensemble des contraintes physiques, psychiques et psychosociales auxquelles sont confrontés les soignants dans un environnement de travail de plus en plus complexe favorisent les TMS :

  • population vieillissante ;
  • pluripathologies ;
  • pression économique;
  • exigence du public ;
  • organisation du travail…) .

 

Le manque de reconnaissance de la hiérarchie, l’insatisfaction au travail, la charge élevée de travail et la pression du temps, sont également des éléments reconnus pour agir sur l’apparition de ces troubles.

Le secteur médico-social : une pénibilité du travail importante

Le secteur de la santé, et plus particulièrement de l’aide à la personne dépendante, fait partie des secteurs les plus touchés par les TMS.
Les manipulations des personnels pour assurer les soins primaires des résidents tels que :

  • le port de charges;
  • le déplacement d’objets ou de personnes ;
  • les chutes de plain-pied ou de hauteur ;

sont particulièrement fréquents dans les EHPAD. Ces nombreuses tâches réalisées par les soignants rendent pénible le travail d’un point de vue physique. Les tâches de manutention des patients, comme le levage, le déplacement et le repositionnement, ainsi que le maintien de positions contraignantes représentent la principale cause des TMS.

Des pathologies selon la profession

Tout le personnel soignant n’a pas propension à développer les mêmes TMS. Les troubles dépendent de la fonction exercée, même si la grande majorité souffre de TMS des membres supérieurs et du dos.

Les brancardiers sont ainsi considérés comme une population à risque, non seulement pour les TMS supérieurs et du rachis (multiples manutentions de personnes), mais aussi des membres inférieurs. Leur fonction les amène à traverser les services, avancer dans les couloirs, ce qui relève souvent de la course d’obstacles.

Les aide-soignants (AS) et les infirmiers sont également très touchés. Plus de la moitié de leurs TMS concernent le tronc, et plus particulièrement la région lombaire. La plupart sont attribués à des réactions à l’effort et à la répétitivité, non à un mécanisme de blessure. Les typologies de TMS chez les soignants varient aussi selon le lieu d’exercice de la profession. Ainsi, les salariés travaillant en EHPAD sont particulièrement touchés.

Les 3 principaux risques de TMS

Les risques liés aux positions, efforts, répétitions des gestes, vibrations…

Garder les bras levés au-dessus de la hauteur des épaules, plier ou tordre le poignet ou rester le dos, la nuque penchés en avant sont des positions inconfortables. Combiner ces postures contraignantes avec un effort conséquent ou la manipulation d’une charge augmente encore la pénibilité. La traction ou la compression sur les articulations, les muscles, tendons et ligaments est élevée, avec des risques de détériorations de ces éléments. Si ces gestes sont effectués de façon répétée et de façon prolongée, le risque de souffrir d’un trouble musculo-squelettique est fortement aggravé. D’autres caractéristiques vont encore compliquer la situation comme la qualité de la prise des objets (poignées, manches…), la qualité de l’outil ou du mobilier et la production de vibrations par l’outil ou le véhicule.

Les risques liés à l’organisation

La difficulté, voire l’impossibilité, de planifier son temps de travail ou la répartition inégale des pauses concentre les périodes pénibles. Un travail monotone surcharge toujours les mêmes articulations. De plus, un service en désordre, des voies de circulation mal entretenues augmentent les risques de chutes et glissades et obligent, souvent, à adopter des postures plus contraignantes. Il en va de même en cas d’absence de programme de maintenance des équipements de travail. Le manque d’entretien du matériel ou le remplacement insuffisant de celui endommagé augmentent les risques liés aux positions, efforts, répétitions des gestes, vibrations…

Les risques liés à l’environnement

Les conditions environnementales comme la présence de courants d’air, le froid peuvent augmenter le risque de souffrir d’un TMS. Par exemple, le froid augmente la force musculaire requise par les muscles des avant-bras et sollicite davantage les tendons, ce qui entraine une mauvaise perception de l’outil et une moins bonne coordination musculaire. Un éclairage défectueux rend les déplacements plus risqués par la moins bonne vision des obstacles et des dénivellations. Un bruit soutenu perturbe la communication et augmente le sentiment de fatigue.

Etat des lieux des politiques de prévention existantes

Les TMS sont la conséquence de nombreux problèmes : de santé certes, mais aussi d’organisation, de management et d’équipement.

3 types de politique de prévention ont ainsi été établies. Certaines sont mises en place dans les établissements de soin, avec plus ou moins de succès.

Le peu de succès de la prévention primaire des TMS – éviter la survenance de TMS – s’explique essentiellement par le manque de personnel, d’aménagements et d’équipements et de temps.

Par exemple, une AS en EHPAD va souvent devoir réaliser seule la manutention de personnes grabataires, et elle devra faire vite.

La prévention secondaire des TMS – détection précoce des TMS – est assez peu développée.
S’il est conseillé aux établissements de soins d’organiser des réunions/formations à ce sujet ou d’évaluer la pénibilité tout au long de la carrière, dans les faits, peu s’y plient. De nombreuses études pointent des gestes « mal exécutés » pour expliquer les TMS des soignants.

Enfin, la prévention tertiaire des TMS consiste en la mise en place de mesures ergonomiques qui viennent modifier les situations de travail : adaptation au poste de travail, éducation thérapeutique, etc.

Les voies d’amélioration

Dans un contexte où les 75-84 ans passeront de 4,1 millions en 2021 à 6,1 millions en 2030, il devient urgent de donner la priorité à la réduction de la sinistralité des TMS et à améliorer les conditions de travail des personnels soignants qui s’investissent auprès des plus âgés. D’où l’importance d’accompagner et d’aider les équipes en leur donnant les clés pour prévenir des situations inconfortables, voire dangereuses.

Évaluer les risques d’apparition de TMS en EHPAD

Il incombe à l’employeur de préserver la santé physique et mentale de ses salariés (article L. 4121-1 du Code du travail). La prévention des risques liés aux TMS s’inscrit dans le cadre de cette obligation légale de l’établissement. Afin de prévenir les risques, l’employeur est d’abord tenu de les identifier. Il doit analyser les atteintes à la santé existantes, d’une part, et repérer les risques en observant l’environnement et les gestes de travail du personnel soignant d’autre part.

L’institut national de recherche et de sécurité préconise 4 étapes pour une démarche de prévention efficace des TMS :

  1. Se mobiliser et travailler ensemble.
  2. Investiguer afin de connaître le risque, d’analyser les situations pour identifier les facteurs de risques : études de postes, analyse du travail, évaluation des sollicitations biomécaniques…
  3. Maîtriser le risque en agissant sur les situations de travail.
  4. Évaluer les actions mises en place

Une démarche participative et pluridisciplinaire est essentielle pour la mise en place et la réussite de cette évaluation des risques. L’ensemble du personnel doit y être intégré : la direction, les soignants, le CSSCT et le service de prévention et de santé au travail.

Intégrer du matériel de manutention aux soins

L’utilisation de matériel de manutention est aujourd’hui encore bien trop souvent réservée aux prises en charge de cas lourds. Afin de généraliser leur usage, et parvenir à les intégrer totalement aux processus de soin, il est essentiel de mettre en avant leur aide à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins.

L’énorme impact de l’utilisation du matériel de manutention lors des soins sur la diminution de l’apparition de TMS n’est plus à prouver. Elle nécessite cependant une mobilisation de l’ensemble des soignants et de la direction et la mise en place de formations pour accroître le taux d’utilisation.

La formation, un outil indispensable de lutte contre les TMS

La formation du personnel soignant est une composante essentielle de la prévention des TMS. Elle permet de comprendre les enjeux liés aux TMS et

  • de s’approprier la démarche de prévention ;
  • de faciliter la compréhension de celle — ci ;
  • d’impliquer les différents acteurs de l’EHPAD ;
  • de pérenniser la démarche de prévention et les résultats obtenus ;

 

Les soignants sont formés à l’ergonomie et au risque de TMS dans leur formation initiale. Cependant, des formations régulières permettent de leur rappeler pourquoi ils doivent prendre soin d’eux, comment le faire, et quel est l’intérêt des différentes aides techniques.

Savoir s’organiser, utiliser les gestes et postures adaptés, utiliser les moyens de protections mis à disposition sont autant de sujets à aborder afin de rendre les soignants acteurs de la prévention.

Mettant son savoir-faire au service des soignants, AFPC propose un ensemble de formations répondant aux exigences métier des différents professionnels de santé.

 
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